C’est dans son restaurant L’Étincelle que je rencontre Hamid Hammar. Je le croise déjà depuis quelques mois. Hamid est le patron de cette brasserie aux accents typiquement parisiens. Il est un solide gaillard au regard clair et à la voix douce. Et quand vous le croisez pour la première fois, vous ne pouvez que vous dire que cet homme incarne la gentillesse et la tranquillité. Il nous parle de son restaurant et de la manière dont il a vécu la crise de la Covid.
Nous nous installons sur une petite table, où il y a un peu plus d’un an, des clients pouvaient encore déjeuner, dîner ou boire un verre. Rentrer dans une salle de restaurant et nous asseoir à une table ! Même si je sais que cela est parfaitement autorisé, je ne peux m’empêcher d’avoir dans un coin de ma cervelle ce petit parfum d’interdit, ce petit goût de transgression. Cette sensation passe très vite, fort heureusement.

Nous discutons. J’ai envie de mieux connaitre le personnage. Hamid me raconte brièvement son parcours. Il a étudié l’économie à Paris Assas puis a été engagé dans une grande entreprise à la Défense. Sa carrière est interrompue par un très grave accident de la circulation. Hamid met le temps de son rétablissement à profit pour réfléchir à son avenir, à ce qu’il imagine pour le futur. De nature indépendante, et enfant de commerçants, c’est naturellement qu’il se dirige vers le la restauration. Il rachète L’Étincelle, un établissement où tout reste à reconstruire.
Il bosse dur avec son épouse. Jusqu’à trois heures du matin bien souvent. Il dort quelques heures avant de partir pour Rungis acheter les produits frais qu’il servira dans la journée. À peine le temps de voir ses enfants de quatre et sept ans.
À force de courage et d’idées, l’affaire décolle peu à peu. Il a maintenant quatre salariés.
Puis viennent les grèves et les manifestations. À chaque fois, c’est un coup dur. Mais Hamid n’est pas du genre à se laisser abattre. Il en a connu d’autres. Il redouble d’efforts.
C’est maintenant que la Covid entre en scène. Tout s’arrête. C’est le premier confinement. Hamid et son épouse ne peuvent plus travailler. Ils sont cloitrés chez eux. C’est en souriant que Hamid me décrit le bon côté de cette étrange période. Il peut enfin se reposer. Et surtout, rattraper tout le travail administratif qu’il a en retard.
Les commerces ouvrent à nouveau. Le temps de quelques semaines durant lesquelles les parisiens s’évadent en province. Les affaires ne sont pas fastes. Ce n’est pas grave. Cela repartira à la rentrée se dit-on. Mais comme on le sait, l’épidémie surgit à nouveau et le confinement est de nouveau d’actualité. Hamid se bat. Malgré les aides de l’État, ce n’est pas facile. La bailleur en particulier ne veut rien céder, le loyer reste à payer. Tout comme les charges. Les commerçants et les entrepreneurs en savent tous quelque chose.
Aujourd’hui, L’Étincelle propose des plats à emporter. Des tajines et couscous à partir de 11 Euros, entre autres. Il suffit de passer devant le restaurant aux heures de repas pour constater que les clients apprécient.
Quand j’interroge Hamid sur l’avenir, celui-ci ne quitte pas sa réserve et son regard se perd au loin. Il reste optimiste bien entendu, mais s’interroge sur les futures semaines. Oui, il va pouvoir ouvrir la terrasse, mais avec la distanciation nécessaire et les vacances très prochaines, il avoue que cela risque d’être difficile. D’autant qu’il ignore encore dans quelle mesure les aides seront maintenues. Il ignore tout autant s’il devra à nouveau payer les taxes de terrasses comme l’a annoncée la Marie de Paris.
En attendant, l’odeur de l’agneau grillé et des épices commencent à flotter dans le restaurant. Quand je sors de l’Étincelle, il est quinze heures trente et j’ai une faim de loup.
L’Étincelle, 326, rue Lecourbe. 75015 Paris.
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